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Enquête sur les mobilités métropole-montagne : qui est prêt à lâcher le volant ?

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L’Agence, dans le cadre de ses réflexions partenariales autour des mobilités, transitions, résiliences et modes de vie, a passé une commande auprès d’étudiants de l’IUGA. Une enquête a été réalisée auprès des grands navetteurs pour mieux comprendre les freins au changement de comportement de mobilité, et les leviers potentiels en sa faveur.

Enquête sur les mobilités métropole-montagne : qui est prêt à lâcher le volant ?

Qui sont les grands navetteurs, ces personnes qui parcourent au moins 50 km aller-retour par jour en voiture pour leurs navettes domicile-travail dans l'aire grenobloise ? Comment organisent-ils leur vie quotidienne et leurs mobilités ? Comment s’adaptent-ils face au coût et aux contraintes de la mobilité quotidienne ? Comment se projettent-ils face à l’augmentation du prix du carburant ou aux restrictions accrues à la circulation des véhicules anciens / polluants ?
Dans un contexte de précarité énergétique, l’Agence a souhaité approfondir la question de la mobilité automobile sur les ménages et comprendre les besoins et le vécu des habitants des territoires périurbains, ruraux ou de montagne. Une commande a été passée auprès des étudiants du Master ingénierie du développement territorial et de la transition de l’IUGA afin d’identifier les freins au changement de comportement de mobilité, et les leviers potentiels en sa faveur.

Une enquête basée sur des « récits de vie »

Les étudiants ont interviewé 25 grands navetteurs et en ont tiré des récits de vie qui "racontent" la vie quotidienne des personnes, mettent en évidence les contraintes auxquelles elles font face et décrivent leurs éventuelles stratégies d'adaptation.

4 profils ont été identifiés par les étudiants

  1. Les adaptés > "je veux, je peux, je fais" : des personnes qui ont changé / sont prêtes à changer de véhicule pour passer à l’électrique ou à l’hybride mais ne sont pas prêtes à abandonner la voiture pour autant.
  2. Les rétifs > "je ne veux pas, je peux, je ne fais pas" : des personnes qui sont peu enclines à changer leur mode de transport, leur véhicule, leur mode de vie.
  3. Les attentistes > "je veux, je peux, je ne fais pas" : des personnes qui ont identifié des alternatives crédibles (report modal principalement) et seraient prêtes à sauter le pas … mais qui ne le font pas en raison de contraintes extérieures.
  4. Les contraints > "je veux, je ne peux pas, je ne fais pas" : des personnes dépendantes de l’usage de la voiture faute d’alternative, pour qui les coûts de déplacement représentent une contrainte financière importante, ce qui les empêche par ailleurs de changer de véhicule et les amène à faire certains sacrifices sur d’autres dépenses.

Le 6 février dernier, une séance de créativité a été organisée à l'Agence avec un panels d’experts (chercheurs, techniciens, chargés d'étude de l'Agence). Cette rencontre a permis de mettre en débat les analyses de l'enquête et de discuter des écarts entre la perception des personnes sur leur mobilité et les politiques publiques mises en œuvre.

Des pistes pour aider les navetteurs à réorganiser leurs mobilités

Issues de la séance avec les experts et de la lecture des récits de vie, des pistes d’actions ont été évoquées :

  • Aller au-devant des individus pour leur faire prendre conscience des coûts de la mobilité et les aider à (ré)organiser leurs déplacements : informations sur les offres alternatives, réseau des conseillers en mobilité, plans de mobilité-employeur, plateforme de calcul du coût des mobilités, mise en réseau des individus...
  • Lever les freins au changement de mode de transport : accompagnement pour la gestion des enfants, tarif transports en commun à la carte et ajustement de l’offre, maillage stations autopartage et points de location Métrovélo...
  • Expérimenter un dispositif "Territoire Zéro Grand Navetteur" : sur le modèle territoires "Zéro chômeur", financement public d'actions permettant de diminuer la mobilité...

6 février à l’Agence : échanges entre étudiants et experts autour des profils des grands navetteurs

Ce travail, de par la richesse de son contenu et l’originalité de la démarche, pourra nourrir l’Agence dans ses réflexions sur la prospective, l’observation et le chantier des « transitions sociétales » pour l’Etablissement Public du SCoT de la grande région de Grenoble ou encore sur le « grand Plan de déplacements urbains » du Smmag.

De nombreux enseignements sur les modes de vie, communs à tous

  • Un mode de vie choisi par les grands navetteurs en majorité (choix résidentiel, acceptation des contraintes liées...).
  • Une dépendance à la voiture très forte, souvent faute d’alternatives crédibles compte tenu de la localisation, de la nature de l’emploi occupé (horaires décalées par ex.) ou des contraintes familiales, mais aussi en raison d’un attachement réel à ce mode de transport et au sentiment de liberté qu’il procure ...
  • Des solutions alternatives mal connues ou jugées rédhibitoires (transports en commun, covoiturage...)
  • Une volonté d'optimiser le temps de trajet plus que de réduire les coûts. La gestion du temps dans un contexte de congestion du trafic apparaît un comme un défi majeur notamment pour les personnes ayant des enfants. Elle peut conduire à décaler ses horaires de travail, à optimiser ses activités (ex. sport entre midi et deux) ou à recourir au télétravail partiel. Concernant le coût, la majeure partie des personnes interrogées sont peu regardantes car la mobilité quotidienne est vue comme une dépense obligatoire non-modifiable, même si certaines personnes soulignent le poids du budget « voiture » et indiquent que cela peut les contraindre à optimiser leurs déplacements ou à renoncer à d’autres dépenses.
  • Une organisation personnelle ou familiale facilitée par l'utilisation de la voiture (accompagnement des enfants, achats, loisirs...) voire, dans certains cas, un abandon des transports en commun au profit de la voiture jugée plus souple pour faire face aux contraintes liées à l’emploi du temps des jeunes enfants.
  • La hausse du coût ou l'évolution de la réglementation [scénarios proposés aux enquêtés] entraînent une prise de conscience et une volonté de changement, mais cela ne suffit pas forcément à impulser un basculement définitif vers d'autres modes de transports.
  • Déménager ou changer de travail afin de réduire sa dépendance à la voiture ou ses coûts de transport ne sont pas des solutions envisageables pour la quasi-totalité des participants.

Liens utiles

Note de synthèse des étudiants
Note de synthèse de l'Agence

Les encadrants de l'étude
Université : Grégoire Feyt et Nassima Hakimi
Agence : Gabriel Jourdan et Léna Boudin

Les mobilités à l’Agence