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Enquête sur la précarité énergétique des étudiants grenoblois : les facteurs de risque

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Les résultats de l’étude présentés auprès des membres du Club des partenaires de l’Observatoire national de la précarité énergétique sont riches en enseignements sur la situation énergétique des étudiants de la région grenobloise. Ce travail d’analyse s’inscrit dans une réflexion commune menée par la chaire HOPE de la Fondation Grenoble INP et l’Agence d’urbanisme sur les liens entre logement, énergie et santé pour le public cible des étudiants et est valorisé dans plusieurs webinaires en 2022.

Enquête sur la précarité énergétique des étudiants grenoblois : les facteurs de risque

Après une présentation des résultats provisoires en novembre 2021, une seconde présentation a été réalisée le 10 mai 2022 par Isabelle Reynaud et Déborah Sauvignet, chargées d'études, auprès des partenaires de l'Observatoire national de la précarité énergétique (la chaire HOPE de la fondation Grenoble INP, le Ministère de l'Ecologie (la Direction générale de l’énergie et du climat - DGEC), le CGDD, le Réseau des Acteurs de la Pauvreté et de la Précarité Energétique dans le Logement (RAPPEL), le CLER Réseau pour la Transition Energétique, Engie, EDF, Total, Total Energie, Agences locales et régionales de l’énergie et du climat (ALEC, AREC) ...).

Une étude menée dans le cadre d'un atelier pédagogique

Selon l’Observatoire national de la précarité énergétique, 12 millions de personnes en France sont en situation de précarité énergétique. La chaire HOPE de la Fondation Grenoble INP et l’Agence d’urbanisme de la région grenobloise ont souhaité mener une réflexion commune sur les liens entre logement, énergie et santé (en intégrant la notion de bien-être) pour le public des étudiants, peu étudié à ce jour.

Dans le cadre d’un atelier pédagogique, une étude a été engagée en partenariat avec l’Institut d’urbanisme et de géographie alpine (IUGA) de l’Université Grenoble Alpes. L’atelier visait trois objectifs :

  • Établir des portraits de la précarité énergétique étudiante à Grenoble,
  • Révéler les stratégies mises en place par les étudiants et les solutions existantes sur le territoire par l’analyse de la prise en compte de la question de la précarité énergétique étudiante dans les politiques publiques,
  • Proposer des perspectives d’évolution dans la lutte contre la précarité énergétique des étudiants.

Au cours de l'hiver 2020, une enquête a été réalisée par des étudiants du Master Ingénierie du Développement Territorial et de la Transition avec le concours des établissements universitaires grenoblois (UGA, INP, IEP).
Un questionnaire a été diffusé par mail auprès des 60 000 étudiants du site et a recueilli plus de 2 000 réponses. Les informations recensées concernent plusieurs volets : description du logement, ressources et poids des charges d’énergie, confort dans le logement, impact des situations d’inconfort sur la santé et caractéristiques socio-économiques de l’étudiant. Cette approche a été enrichie par des entretiens qualitatifs auprès d’étudiants se disant concernés par la précarité énergétique et treize entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès d’un échantillon d’acteurs de l’habitat et de l’énergie (collectivité, bailleurs sociaux, structures accompagnant la lutte contre la précarité énergétique…).

La Chaire HOPE a sollicité l’Agence pour approfondir ce travail, avec deux objectifs : contextualiser l’échantillon enquêté à travers un audit des données et approfondir les analyses menées par les étudiants.

Les enseignements de l'étude

Les résultats de l’enquête apportent des éclairages intéressants sur les facteurs de risque de subir cette précarité énergétique dans la population étudiante :
- Loger dans le secteur locatif diffus accroît le risque de précarité énergétique. En effet, les logements proposés par des bailleurs particuliers présentent plus fréquemment un inconfort thermique, et le dialogue avec le propriétaire est souvent malaisé.
- Un logement de mauvaise qualité impacte la santé physique et mentale des étudiants, ce qui entraîne ensuite des conséquences néfastes pour la réussite de leurs études.
- Les étudiants apparaissent globalement peu sensibilisés à la question de l’efficacité énergétique de leur logement. Ce critère, peu mobilisé au moment du choix du logement, les rend de facto vulnérables aux situations de précarité énergétique. En effet, les dépenses énergétiques sont potentiellement peu anticipées, de même que les situations d’inconfort possibles.
- La mobilisation des aides sociales en cas de difficultés pour payer les factures d’énergie semble peu répandue parmi les étudiants.

Les évolutions législatives récentes devraient permettre d’améliorer progressivement la qualité thermique des logements, notamment ceux du parc diffus occupés par les étudiants. La sensibilisation de la population étudiante à la problématique de la précarité énergétique semble également un levier majeur. Enfin, les causes du non-recours aux aides par les étudiants en difficulté mériteraient d’être approfondies.

Chiffres-clés

  • Un tiers des répondants déclare souffrir du froid dans leur logement contre 15 % de la chaleur
  • 31 % des répondants ont remarqué des traces de moisissures ou d'humidité dans leur logement
  • Seulement 5 % ont recours à des aides (chèque énergie…)
  • L’impact de la précarité énergétique sur la santé a été mis en exergue
    • 15 % des répondants souffrant du froid dans le logement estiment avoir un mauvais état de santé général
    • 28 % des répondants ayant des difficultés à payer les factures d’énergie estiment avoir un mauvais état de santé général

"Depuis quelques années, l’Agence d’urbanisme intègre la problématique de la santé dans ses travaux. Les enjeux sont importants en termes d’urbanisme, avec des implications concrètes sur les procédures et dispositifs mis en œuvre : PLH, PLUi, Mur/Mur. En plus des problèmes financiers et matériels occasionnés, la précarité énergétique induit également des préjudices en termes de santé. Enrichir la connaissance des conditions de vie des étudiants semble d’autant plus nécessaire que la crise sanitaire récente a particulièrement fragilisé cette population qui présentait déjà des signes de précarité importants."

Isabelle Reynaud, chargée d'études principale Mobilité / Énergie, et Déborah Sauvignet, Chargée d'études Habitat / Observation