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OBS'ELUS | Modes de vie & mobilités : qu'est-ce que le coût résidentiel ?

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Dans le cadre de son chantier socle sur l’observation renouvelée (Projet d’Agence 2021-2026), l’Agence a ouvert un cycle de rencontres-débats avec les élu·e·s. Retour sur la (première) séance OBS'ELUS du 10 octobre 2022 dédiée à l’approche coût résidentiel, pour laquelle l'Agence a invité d’une part l’équipe de chercheurs investis sur le projet COUT-RES et d’autre part des élus de la grande région grenobloise à échanger, assurant ainsi la jonction entre son expertise mobilités (en lien avec l’enquête EMC2), la Recherche et les préoccupations des territoires.

Modes de vie & mobilités : qu'est-ce que le coût résidentiel ?

Une analyse croisée des questions de mobilité, d’habitat et de vulnérabilité énergétique

Au cœur de la vie quotidienne, les questions de mobilité, d’habitat et de vulnérabilité énergétique sont hautement d’actualité quand le pouvoir d’achat des ménages s’effrite. Si l’Agence s’intéresse à cette question, c’est d’une part parce qu’elle est missionnée pour analyser et valoriser les résultats de l’enquête Mobilité ; et d’autre part parce qu’elle s’est associée à un partenariat, qui réunit des laboratoires de recherche et des acteurs des territoires, pour répondre à un appel à projet de recherche sur cette notion de coût résidentiel qui permet de croiser un ensemble de données.

Le regard des chercheurs

Jean-Pierre Nicolas, directeur de recherche CNRS (LAET) a introduit la notion de coût résidentiel et présenté le projet de recherche COUT-RES.

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© LAET

Le coût résidentiel, notion creusée depuis une 20ne d’années avec des approches économiques, puis des travaux sur la précarité énergétique, favorise une approche territoriale systémique de la vie des ménages, associant logement et mobilités.

Afin de pouvoir mesurer à la fois les dépenses liées au logement et à la mobilité pour un ménage donné, le projet de Recherche COUT-RES s’est adossé au renouvellement de l’Enquête mobilité par le Cerema. Un module expérimental sur le coût résidentiel a été introduit dans l’enquête avec des questions sur le logement ; les territoires grenoblois et clermontois se sont proposés pour le tester. Aujourd’hui l’équipe de chercheurs suit les enquêtes en cours (EMC2 Clermont-Ferrand) et exploite les données (EMC2 grande région grenobloise, accompagnée par l’Agence).

Maria Besselièvre doctorante (LAET) a rendu compte de son travail avec les acteurs des territoires et souligné l’importance d’aborder en globalité la question de la résidence des ménages et leur localisation sur les territoires. Aujourd'hui le prisme se fait par domaine de compétence : mobilité, transport, énergie, aménagement, habitat...“Le coût résidentiel invite à la transversalité et à regarder son objet de compétence un peu différemment. La question à se poser est : à l’amont d’un programme immobilier, qui va venir vivre ici, comment penser la mobilité des futurs habitants dès le début du projet.”

Damien Verry, directeur de projet Cerema, a présenté les premiers résultats provisoires, voués à être affinés et complétés dans les mois prochains.

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© LAET
Source : Ali El Zein (LAET, projet Cout-Res), à partir de l’EBdF 2017; EMC² Grenoble 2020

Ces premiers résultats provisoires décrivent la décomposition du coût résidentiel par poste de dépenses ainsi qu’une caractérisation selon le type de revenu. Ils seront affinés à la fois pour estimer le coût résidentiel liés aux comportements de chaque ménage et pour établir les déterminants du coût résidentiel et la sensibilité aux hausses des prix. Une première approche sur les émissions moyennes de polluants liés aux mobilités selon le revenu du ménage sur le périmètre de l’EMC² Grenoble est également amorcée.

Le débat avec les élus

Les élus présents, issus de la diversité des territoires de l’aire grenobloise, ont accueilli très positivement la présentation de ce partenariat avec la Recherche et des premiers résultats, qui font écho à leurs problématiques et interrogations.

Des clés de compréhension nouvelles

Les interventions de chacun convergent vers une première attente globale : ils sont venus chercher des clés de compréhension : Comment répondre aux habitants ? Comment la ville va évoluer ? On attend ce type d’outils... Avoir quelques indicateurs pour comprendre mieux les choses, c’est la raison de ma venue” a exprimé Bertrand Spindler (maire de La Tronche).

Cette approche du coût résidentiel apparaît utile pour dialoguer avec les habitants mais aussi avec les professionnels qui les accompagnent. Il existe d’ailleurs des calculateurs de coût résidentiel, pour aider les ménages à choisir leur localisation résidentielle en prenant en compte tous les coûts que cela génère. Par exemple E-Mob développé par EPUres (Agence d’urbanisme de la région stéphanoise) permet à un ménage de calculer le coût de son logement et le coût de sa mobilité en fonction de sa localisation résidentielle et de ses usages.

Patrice Ferrouillat maire de Cognin-les-Gorges rebondit sur l’intérêt de cette vision globale au regard des problématiques de sa commune rurale : “Si on arrive à créer de l’habitat dans notre village éloigné des centres urbains, quel va être le coût résidentiel pour nos habitants ? A qui on va-t-on destiner ces habitats ? Les gens en situation de précarité seront-ils en capacité de vivre dans notre commune ? “ Avec l’approche coût résidentiel, c’est un des enjeux vers lequel les chercheurs veulent orienter les regards, comme point de vigilance pour les politiques de l’habitat vis-à-vis des ménages modestes : éviter d’attirer des ménages modestes par des coûts d’habitat faible alors qu’ils ne pourront pas assumer leurs frais de déplacements.

Territorialiser, affiner les profils… Des attentes s’expriment

Coralie Bourdelain, (vice-présidente de la communauté de communes Le Grésivaudan et vice-présidente du SMMAG) exprime une attente plus précise vis-à-vis des chercheurs : “Est-il possible de faire un focus en fonction des territoires ?” "L’analyse territoriale est une évidence” lui répond Jean –Pierre Nicolas, “ Nous allons dans les mois qui viennent nous interroger ; pour faire le bon découpage on a besoin de bien comprendre ce qui explique le niveau du coût résidentiel, quels sont les facteurs du coût résidentiel pour catégoriser les territoires et dépasser ces premiers résultats. "

Martial Simondant (vice-président de l’EP SCoT de la GReG et maire d’Artas) insiste également sur la prise en compte du parcours de vie et des évolutions sociétales qui impactent les activités au sens large (travail ou loisirs). Là aussi les chercheurs ont prévu de travailler et d’affiner l’analyse autour des types de ménage, pour analyser les différences en termes d’usages et de contraintes entre les ménages jeunes et les ménages retraités. Sur la question des évolutions sociétales et notamment du télétravail, l’enquête en cours sur Clermont Ferrand va permettre de mieux l’étudier ; l’ambition à terme est d’avoir un module coût résidentiel qui fonctionne et de constituer une base de données sur 10 ou 15 ans.

La question du revenu disponible (une fois les dépenses de logement et mobilité prises en compte) est aussi discutée au regard des différentes situations observées et du contexte actuel. Ramener les dépenses logement et transport au revenu global pour mesurer l’arbitrage sur le choix des dépenses est aussi un axe de travail. Le “reste à vivre” (ce qui reste lorsque toutes les dépenses contraintes sont intégrées) serait d’ailleurs l’indicateur idéal. Il reste toutefois « difficile à approcher d’un point de vue strictement statistique ; la logique c’est souvent de compléter par des enquêtes qualitatives pour appréhender réellement les contraintes d’un ménage” explique Damien Verry.

Le besoin d’une vision prospective

Martial Simondant exprime le fort besoin d’une vision prospective pour aménager les territoires. Damien Verry confirme qu’actuellement, c’est une exploitation des données de l’enquête qui est menée mais qu’ensuite des simulations pourront être conduites (par exemple en modélisant une augmentation du prix de l’énergie) pour mettre à disposition des territoires des éléments de prospective.

L’approche coût résidentiel des ménages donne en outre une lecture des émissions des ménages par profil entre précarité, vulnérabilité et hyper mobilité. Une autre dimension à affiner, qui viendra enrichir le dialogue en cours avec les habitants dans le cadre de la mise en œuvre de ZFE et les réflexions sur les outils à mettre en place pour aider les ménages à baisser leurs émissions. Work in progress…

Retour sur la séance OBS'ELUS du 10 octobre 2022

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Maria Besselièvre, Damien Verry et Jean-Pierre Nicolas
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Frise de contextualisation autour de l'actualité sur les questions de coût de l'énergie, de pouvoir d'achat, de moblilité

Aller + loin

Diaporama avec les premiers enseignements du projet COUT-RES présenté à la séance OBS'ELUS du 10 octobre 2022

L’observation

Activité historique à l’Agence, en lien avec ses partenaires techniques, qui permet de réinterroger la connaissance en fil continu, en décryptant les mutations de la société et des territoires, dans une approche globale, transversale et systémique. Dans le contexte actuel, l’accélération et la complexité des phénomènes et des mutations nécessite de renforcer encore les capacités d’observation de l’Agence, au sein d’approches renouvelées, multi-partenariales, pour disposer de données aussi robustes que possible, mais aussi, répondant du mieux possible aux besoins et priorités des territoires.

L'observation, une compétence centrale et transversale

EMC2, l'enquête mobilité grande région grenobloise